Une question des droits de la personne

Les campements au Canada sont l’un des échecs les plus visibles et les plus graves des gouvernements à protéger le droit de la personne à un logement adéquat.

Depuis le début de la pandémie, nous assistons à une nette augmentation du nombre de campements partout au Canada. Les logements deviennent de plus en plus inabordables et inaccessibles. Les personnes perdent leurs moyens de subsistance et leur logement. De nombreux centres de services sociaux et refuges sont à pleine capacité.

En conséquence, plus de personnes que jamais se voient forcées de vivre dans des tentes ou se tourner vers des abris de fortune pour survivre. Beaucoup n’ont nulle part ailleurs où aller.

Bien que les tribunaux et les organismes de défense des droits de la personne reconnaissent de plus en plus l’itinérance non-hébergée comme une question relevant des droits de la personne, les personnes résidant dans des campements font face à des violations de leurs droits fondamentaux sur de nombreux fronts. Leur dignité et leurs droits sont souvent ignorés.

Les conditions de vie dans les campements, conjuguées à l’incapacité sous-jacente des gouvernements de tous les niveaux de garantir l’accès à un logement adéquat, constituent une violation des droits fondamentaux de la personne, notamment le droit au logement.

Cette crise des droits de la personne ne va pas disparaître. Le Canada doit faire mieux pour répondre aux besoins essentiels des personnes en matière de logement et de sécurité. Il incombe à tous les ordres de gouvernement de trouver des solutions durables qui renforcent la dignité des personnes et leurs droits de la personne, y compris leur droit à un logement adéquat.

Que sont les campements?

Nous utilisons le terme « campements » pour désigner les campements temporaires en plein air sur des terrains publics ou privés. Ces installations de fortune résultent d’un manque de logements accessibles et abordables.

Les personnes qui vivent dans des campements se trouvent dans certaines des situations les plus précaires de notre société. Nombre d’entre elles doivent faire face aux effets combinés de la crise du logement, de la crise sanitaire provoquée par la pandémie et d’une grave récession économique. Elles ont souvent été confrontées à des discriminations liées à l’héritage historique du colonialisme, du racisme, du sexisme, de la discrimination fondée sur la capacité et d’autres formes de marginalisation.

Les personnes résidant dans les campements sont souvent victimes de harcèlement et de violence de la part de la police, des agents municipaux et du public. La plupart n’ont pas accès à des services de base comme l’eau potable ou le chauffage. Certaines ont subi des préjudices ou sont décédées à la suite d’une exposition aux éléments, d’un incendie, d’une surdose et d’autres menaces à leur vie et à leur sécurité.

Ces conditions sont une atteinte à leur dignité humaine et constituent une violation du droit au logement.

Comme le stipule le Protocole national pour les campements de sans-abri au Canada, les campements sont « des exemples de violations des droits de la personne des personnes qui sont contraintes de s’y installer et de leurs revendications, faites en vertu des droits de la personne et déposées en réponse à la violation du droit au logement ».

En d’autres termes, les personnes qui vivent dans des campements sont à la fois victimes d’une violation de leur droit au logement et revendiquent ce droit de manière très visible, ainsi que celui à un endroit où vivre avec dignité et en toute sécurité.

Examen de la défenseure sur les campements

La défenseure fédérale du logement a lancé un examen officiel des campements au Canada afin de s’attaquer à cette grave crise des droits de la personne qui sévit dans les villes du pays.

Son examen portera principalement sur des solutions systémiques permettant de s’attaquer aux facteurs qui mènent aux campements, ainsi qu’aux luttes quotidiennes des personnes qui y résident. À l’issue de l’examen, la défenseure fédérale du logement présentera ses conclusions et recommandations au ministre fédéral responsable du logement, et fera également des recommandations aux autres ordres de gouvernement et aux autres intervenants.

L’examen sera guidé par les principes d’une approche fondée sur les droits de la personne. La défenseure fédérale du logement recueillera les témoignages de personnes vivant dans les campements et entendra aussi les organisations de la société civile qui leur viennent en aide, ainsi que des experts en droits de la personne et en logement. Elle consultera également des responsables des gouvernements fédéraux, provinciaux ou territoriaux, et des municipalités.

À l’issue de l’examen, la défenseure fédérale du logement produira un rapport présentant :

  • a. Son avis et ses conclusions au sujet des points susmentionnés;
  • b. Ses recommandations au ministre du Logement et de la Diversité et de l’Inclusion pour qu’il prenne des mesures relevant de la compétence du Parlement – notamment des mesures législatives et réglementaires, des politiques et des programmes, y compris, mais sans s’y limiter, les programmes découlant de la Stratégie nationale sur le logement – afin de :
    • i. Faire progresser la réalisation progressive du droit à un logement adéquat, conformément aux exigences de la Loi sur la stratégie nationale sur le logement et à la Loi sur la déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones;
    • ii. Fournir des solutions appropriées et à long terme pour résoudre les problèmes systémiques de logement auxquels sont confrontées les personnes vivant dans des campements, y compris les répercussions négatives qui touchent de façon disproportionnée les populations autochtones, les femmes et les membres des groupes défavorisés;
    • iii. Défendre la dignité inhérente et protéger le droit fondamental à un logement adéquat et les autres droits de la personne des personnes résidant dans des campements et de celles qui sont à risque de se retrouver en situation d’itinérance, en particulier les Autochtones et les membres des groupes défavorisés;
    • iv. Fournir un soutien approprié pour permettre aux personnes en situation d’itinérance vivant dans des campements de réussir la transition vers des situations de logement appropriées et à long terme qui respectent leur dignité, leur autonomie et leur vie privée.
  • c. Les recommandations de la défenseure fédérale du logement aux gouvernements provinciaux et territoriaux et aux administrations municipales ainsi qu’aux autres acteurs visent à fournir des solutions appropriées et à long terme pour résoudre les problèmes systémiques de logement auxquels sont confrontées les personnes vivant dans des campements.

Contribuer à l’examen

L’examen de la défenseure fédérale du logement comprendra des témoignages de personnes ayant une expérience vécue. Toute personne ayant résidé dans un campement, et les organisations qui défendent leurs intérêts, peut contribuer à l’examen en présentant un mémoire.

La période pour faire une observation est maintenant terminée. Merci à tous ceux et celles qui ont partagé leurs histoires et leurs idées de solutions avec la défenseure. Votre expérience aidera la défenseure à susciter le changement et à faire progresser le droit au logement pour tous au Canada.

Abonnez-vous aux futures mises à jour sur l'examen de la défenseure

Recherche sur les campements

Afin de mieux comprendre ce problème critique, le Bureau du défenseur fédéral du logement a dirigé un projet de recherche visant à fournir des renseignements essentiels sur la question des campements dans cinq régions du Canada.

Les rapports confirment que l’approche punitive des campements ne fonctionne pas. Le démantèlement des campements est dangereux et peut s’apparenter à une expulsion forcée, ce qui constitue une grave violation des droits de la personne. Les chercheurs soulignent que cette approche ne s’attaque pas aux causes sous-jacentes à l’origine de l’augmentation du nombre de campements, qu’elle ne respecte pas les droits des personnes qui résident dans les campements et qu’elle ne contribue pas à offrir un milieu de vie sécuritaire ou une situation stable de logement. Plus préoccupant encore, une approche punitive prive également les personnes résidant dans les campements de leur liberté de choisir et détruit les réseaux d’entraide et les liens communautaires tissés par ces personnes pour s’entraider dans un système défaillant.

Les gouvernements et les décideurs à tous les niveaux doivent placer les droits de la personne et le droit au logement au cœur de leur approche concernant les campements. Les rapports recommandent cinq domaines clés où le Canada doit mieux agir pour faire en sorte que les droits des personnes résidant dans les campements soient respectés :

  • 1. Cesser d’avoir recours aux mesures de maintien de l’ordre et à la police comme réponse aux campements.
  • 2. Fournir du financement et des services relevant des gouvernements fédéral et provinciaux pour soutenir les municipalités qui sont confrontées de manière disproportionnée à l’existence des campements, et pour permettre les investissements dans des options de logement à court et à plus long terme ainsi que du soutien pour les personnes résidant dans les campements.
  • 3. Assurer la participation significative des personnes résidant dans les campements aux décisions qui les concernent.
  • 4. Reconnaître les droits distincts des peuples autochtones et les inclure dans l’élaboration des politiques relatives aux campements.
  • 5. Remédier aux conditions de vie dans les campements et fournir des services de base tels que l’eau potable, les installations sanitaires, l’électricité et le chauffage.

Cet examen en profondeur de la situation relative aux campements contribuera à faire en sorte que la défenseure fédérale du logement et les décideurs de partout au Canada puissent prendre des mesures pour mieux soutenir les personnes résidant dans les campements et faire respecter leurs droits fondamentaux de la personne et leur droit au logement.

Date modifiée: